Le prix du commérage au bureau

Par Mylène Grégoire, présidente et coach PCC chez Mymosa &CO Conseil inc.

Il parait que…

Savais-tu que … ?

Le commérage est omniprésent au bureau. Une équipe de chercheurs de l'Université d'Amsterdam s’est attardé à cette notion de bavardage indiscret. Elle a découvert que 90 % des conversations informelles de bureau peuvent être qualifiées de commérages. Une autre étude menée au Georgia Institute of Technology a conclu que les commérages représentent 15 % des courriels échangés au bureau.

L’utilité du commérage

Les commérages pourraient-ils avoir un but utile ? Le professeur Jack Levin de la Northeastern University, auteur de Gossip: The Inside Scoop, affirme que les commérages peuvent parfois être bénéfiques pour notre bien-être émotionnel, à condition qu'ils ne soient pas destructeurs au point de nuire aux réputations. Selon lui, les commérages contribuent à relier les réseaux sociaux et professionnels, créant des liens entre les individus.

Le commérage peut aussi servir de baromètre pour évaluer le moral des employés. J'ai déjà entendu un président d'une grande entreprise dire : « Je suis soulagé de constater que les sujets de commérages des employés concernent la qualité de la nourriture à la cafétéria. Cela montre que leurs préoccupations sont plutôt légères ! »

C’est aussi un moyen de voir à l’arrière-scène des intentions de l'employeur. En effet, diffuser subtilement une information depuis les niveaux supérieurs peut être un moyen stratégique de prendre le pouls des employés avant de lancer une nouvelle initiative.

Quand le commérage prend une tournure de règlement de compte

L’utilité du commérage peut toutefois perdre quelques plumes dans certains contextes. Imaginez cette situation. Un collègue vous pique en public, vous laisse paraître incompétent ou encore se paie votre tête en riant de votre plus gros défaut… Vous brûlez de colère… Il est tentant d’évacuer la tension, de répondre par la vengeance, de rechercher l’approbation des autres en semant des divisions ou en discréditant cette personne. Ce type de manipulation sert parfois à semer la discorde pour renforcer et se positionner favorablement. Toutefois, ce comportement peut rapidement entraîner un "effet boule de neige", transformant des conflits mineurs en véritables guerres internes, et créant un environnement de travail toxique.

Le désir de renforcer sa crédibilité

Bien que ce soit une réaction humaine de vouloir réagir, rester dans le cercle des commérages s’avère souvent néfaste. La psychologue Peggy Drexler souligne que les personnes qui pratiquent le commérage cherchent souvent à renforcer leur propre crédibilité et statut en dénigrant les autres. Ce comportement peut être vu comme une stratégie pour attirer l'attention sur les défauts des autres, tout en détournant l'attention de ses propres faiblesses​.

La perception du commérage négatif

Cette façon de faire est souvent contre-productive, car les collègues perçoivent rapidement le commérage comme un manque de professionnalisme. De plus, ce comportement peut affecter négativement la réputation de la personne qui colporte les rumeurs​, démontrant une maladresse, un manque de confiance et de courage devant l’adversité, nuisant ainsi aux relations de travail. Contrairement à l'idée que les collègues approuvent automatiquement les confidences, se confier à eux, quel que soit leur niveau hiérarchique ou proximité, peut rapidement devenir pesant et secrètement les irriter.  

Lorsque vous êtes victime du commérage…

Le commérage négatif au travail peut avoir plusieurs effets néfastes sur les employés. Lorsqu’elles en sont conscientes, les personnes visées par ces commérages voient leur confiance en soi et leur motivation s'affaiblir, ce qui affecte leur performance et leur engagement. Le stress généré par ces rumeurs peut également engendrer de l'anxiété, rendant les victimes moins enclines à se montrer proactives dans leurs tâches. De plus, le commérage crée une méfiance au sein de l'équipe, détruit la collaboration et réduit la productivité.

Les conséquences peuvent aussi inclure une baisse du moral et des comportements d’évitement, les employés préférant se retirer de la dynamique de groupe. Dans les cas plus graves, cela peut mener à des plaintes pour harcèlement ou même à des poursuites judiciaires si les commérages deviennent malveillants​.

L’impact vu par les employeurs

La plupart des employeurs reconnaissent l'impact que les commérages négatifs au travail peuvent avoir sur le moral, la productivité et les carrières, mais ils ont peu de moyens efficaces pour y remédier, hormis encourager une communication ouverte. Les politiques anti-commérages se heurtent rapidement à des problèmes liés à la liberté d'expression et aux droits des employés, sans compter la difficulté de déterminer ce qui a réellement été dit et avec quelles intentions.

Faire partie du club !

Et vous, en tant que dirigeant.e, est-ce que vous envisageriez de confier une place à la table des décisions à ceux qui colportent des rumeurs ? Leur accorderiez-vous votre confiance pour les prochaines opportunités de promotion ? Vous investiriez-vous dans ce type de profil, ou préfériez-vous encourager des leaders authentiques, inspirants, et exemplaires qui reflètent vos valeurs et celles de l'organisation ?

Un individu en position de leadership pourrait être tenté d'encourager ce type de comportement si l'un de ses employé.e.s venait à partager des informations utiles, intrigantes ou confidentielles. Couper cette source d'information reviendrait à se priver d'un lien direct avec les employés sur le terrain.

Comment éliminer le commérage négatif ?

La clé pour mettre fin au commérage est de créer une culture de transparence et de confiance. Encourager les échanges ouverts permet non seulement de réduire les rumeurs, mais aussi de favoriser des discussions productives. Lorsqu'une personne réalise qu’elle a tendance à propager des commérages négatifs, elle peut transformer son comportement en adoptant une approche plus positive et constructive. Ce changement de mentalité est non seulement bénéfique pour elle, mais aussi pour l’ensemble de l’équipe.

Miser sur un leadership authentique

Il est beaucoup plus gratifiant de développer un leadership fondé sur la sagesse et l’empathie plutôt que de céder à des comportements nuisibles comme le commérage. Un dirigeant efficace est celui qui renforce son autorité en créant un environnement de travail où règnent le respect mutuel et une communication ouverte. Cela encourage la confiance et l’intégrité, deux piliers essentiels d'une équipe performante.

Les premiers pas vers un changement de culture

Pour créer un environnement libre de commérages toxiques, il est suggéré de mettre en place des pratiques qui encouragent la transparence et l’honnêteté. Cela peut inclure des formations régulières sur la communication et l’éthique, l’instauration d’espaces sécurisés pour exprimer des préoccupations, et un soutien constant des équipes dirigeantes pour établir une culture organisationnelle positive.


Mylène Grégoire, présidente et coach chez Mymosa &CO, autrice, conférencière et fondatrice du programme de formation en ligne Brillez au boulot et De l’intuition au succès.

mymosa.co


RÉFÉRENCES

Psychology today : Why We Love To Gossip - The pros and cons of talking about other people, for men and women by Peggy Drexler

https://www.psychologytoday.com/ca/blog/our-gender-ourselves/201408/why-we-love-to-gossip

Syntrio : The Negative Impact of Gossip in the Workplace

https://syntrio.com/blog/the-negative-impact-of-gossip-in-the-workplace/

BMC Psychology : Workplace gossip erodes proactive work behavior: anxiety and neuroticism as underlying mechanisms

https://bmcpsychology.biomedcentral.com/articles/10.1186/s40359-024-01966-5



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